A l’ORPAN, l’association des seniors nantais, le mois de novembre est aux couleurs des Assises nationales de lutte contre les violences sexistes. Cafés à thème, conférences, ciné-débats ou ateliers abordent la question des représentations et violences sexistes. Reportage lors de deux ateliers proposés par des adhérents de l’association.
A la médiathèque Jacques Demy, les chaises manquent presque pour accueillir la quinzaine de participantes et l’unique participant homme au cercle de lectures partagées de l’ORPAN. C’est Annie qui présente ce matin-là « Un fils parfait », un livre de Mathieu Menegaux, choisi sur le thème des violences faites aux femmes. « C’est un livre dur, qui questionne le lecteur sur un sujet de société : l’inceste. On fait la connaissance du couple soit disant idéal de Daphné et Maxime qui ont deux petites filles. Mais l’univers se fissure quand Daphné comprend que Maxime abuse de ses enfants. On va suivre son parcours, qu’elle raconte dans une lettre à Élise, sa belle-mère ».
Partager des lectures en écho à un sujet de société
« J’ai aimé la loyauté de cette femme-là, qui parle de ses fragilités, de sa souffrance, de son tiraillement, poursuit Annie. Cette lecture m’a aussi permis d’entrevoir les failles de notre système judiciaire, car ce roman s’appuie sur des faits réels. » « Je pensais que les enfants étaient mieux protégés en France, s’indigne Isabelle, et la police n’est pas magnifique dans ce roman. » « Moi, je ne l’ai pas lu facilement : quand ça touche aux enfants, ça me retourne. Mais j’ai été intéressée par la description du cheminement de la mère : le déni d’abord, puis la sidération », indique une autre participante. « Le problème, c’est que Daphné essaie de s’en sortir toute seule, elle ne se fait pas aider », note une autre lectrice.
« Il y a la police, la justice et il y a nous »
Marie-Catherine, qui anime ce jour-là le cercle de lecture, rappelle quelques chiffres : « Il y a 25 à 30 000 plaintes pour viol chaque année en France et seulement 1500 condamnations. On estime que 1 à 2 enfants par classe de primaire ont subi un inceste. Ce livre date de 2016. En 2021, il y a eu une nouvelle loi sur l’inceste. Ça avance, mais doucement. » Pierre souligne aussi « que dans notre pays, la notion de famille est mise sur le devant, on veut préserver à tout prix le noyau familial avant de regarder l’intérêt des enfants. » Le mot de conclusion d’une autre participante, avant de débattre d’un second livre : « L’idée je crois pour chacune et chacun, c’est de rester attentif. Il y a la police, la justice et il y a nous. On doit rester éveillés pour dénoncer. »
Exprimer sa créativité plastique autour de l’image féminine
Autre ambiance à la maison de quartier de Madeleine-Champ de Mars où un petit groupe est en atelier « collages créatifs » sous la houlette de Mireille, assistée de Rosemonde. « On ne se voyait pas parler violences durant 1 mois entier, on a choisi d’élargir au thème de la femme, » précise Rosemonde. Le sujet du jour ? « La plus belle union qui me fait toucher l’or » : Mireille a choisi de commencer par le couple avant la femme. Chacune part d’images de catalogues et de revues pour inventer son univers. La création d’Annick est « virginale : c’est la noce, on est heureux ». Rosemonde est plutôt partie sur l’union du végétal dans des tons pastels. Michèle a choisi de mettre femme et homme dos à dos. « Peut-être qu’il y a une surprise, on invente une histoire en créant ». Dans tous ces collages, point de fissure comme dans le livre de Mathieu Denegaux. « En même temps, on n’est pas dupe, sourit Rosemonde. A 30 ans, tout est parfait : notre couple, nos enfants… Quand on vieillit, on voit les limites et on en parle beaucoup plus librement, c’est appréciable. » Et qu’a concocté Mireille comme sujet du prochain atelier ? « Du fond de la mère », tout un univers !